Toulouse (31000) - [ Tous-publics ] - Débat proposé et animé par l'AERA le mardi 24 février 2015 à 18h30 au Centre Méridional de l'Architecture et de la Ville (5 rue Saint-Pantaléon 31000 Toulouse) dans le cadre des Mardis de l'Architecture et de la Ville.
"Cultures urbaines" est un terme quelque peu institutionnel par lequel on désigne depuis une trentaine d'années les pratiques créatrices nouvelles et informelles dans l'espace public, sportives (skate, parkour,...), dansées (hip hop, breakdance...), musicales (rap, slam...), théâtre de rues et arts du cirque, arts picturaux et sculpturaux (graph, street art...), architectures participatives et dispositifs urbains éphémères, et autres modes de création non académiques, métissés, qui remettent en cause l'ordre social et culturel établi et tendent à le renouveler.
Mais on pourrait à bon droit étendre cette expression de “cultures urbaines” à toutes les formes d'échanges créatives de valeurs nouvelles, qui sont “sociales” avant de devenir économiques et financières. Et ce sont bien ces pratiques alternatives et cette créativité qui se renouvellent en temps de crise, que favorisent les concentrations humaines, en ce qu'elles supposent une multiplicité de rencontres, d'échanges de tous ordres et de créations qui font la richesse d'une ville.
Car le renouvellement dans le domaine de “La Culture” au sens étroit, se développe dans l'ensemble de la création d'activités inscrites dans l'économie urbaine. C'est sa part la plus sociale et informelle (échanges de savoirs, fablab, co-working, insertion, learning by doing, do it yourself, co-voiturage, co-housing, amap, jardins et cuisines collectives... cf. We Traders / Sous la crise la ville) qui donne naissance, nourrit et supporte la part plus formelle (coopératives d'activité, start-up, pépinières d'entreprises, nouvelle économie coopérative...), tout aussi créatrices et culturelles que les pratiques sportives et arts de représentation.
Ces arts et pratiques sociales, économiques et culturelles témoignent d'une créativité urbaine née le plus souvent du manque d'activité et de perspectives de la jeunesse surtout, notamment dans les quartiers déshérités des pays industrialisés, et d'une volonté très large des citoyens de prendre en main leur avenir collectivement par des communautés ouvertes. Ce pourquoi ils débordent tous les cadres disciplinaires et institutionnels pour renouveler les formes d'échanges et les cultures propres à nos “communautés urbaines” dont la part la plus jeune est de plus en plus ouverte aux autres et au monde.
Car si certains arts et pratiques peuvent être socialement clivants, tels le golf, l'opéra ou l'art contemporain, ces arts et pratiques qui se développent dans l'espace public, ouverts à tous et s'adressant à tous, semble réaliser un véritable melting-pot social, culturel et ethnique, là où les arts et sports officiels ont en France le plus souvent échoué à dépasser les fractures sociales et les discriminations. Ces modes de participation à l'espace public adoptent naturellement l'esprit urbain le plus avancé, privilégiant l'échange horizontal le plus ouvert, la plus grande liberté formelle, et un esprit de gratuité dépourvu de tout calcul et de toute spéculation, ce qui fut toujours les conditions d'une authentique créativité.
Si l'on admet alors l'idée que la fin de toute concentration urbaine pourrait bien être la synthèse d'un esprit de création, et que c'est cet esprit agissant qui fonde simultanément l'unité organique (diversification et équilibre des activités), le dynamisme, l'attractivité et la véritable richesse d'une ville, alors les “cultures urbaines” qui sont sans doute les plus vivantes et créatives des “cultures“ aujourd'hui, sont l'eau vive, la sève la plus riche et créatrice de nos villes, et sont, pour cette raison, porteuses de leur avenir.
Dès lors il importe, non de développer cette richesse potentielle par des aides et un contrôle institutionnel et politique, ce qui pourrait bien la tuer dans l'oeuf, ni d'en exploiter le potentiel spéculatif par des investissements semblables à ceux qui vont sur le marché de l'art officiel, mais de développer les conditions économiques du développement de cette créativité, par l'ouverture d'espaces publics à ces pratiques au coeur de nos villes, d'en favoriser la communication, et de faciliter la reconnaissance, le soutien et le développement par les acteurs de l'économie formelle, et les milieux financiers éthiques responsables socialement et économiquement, susceptibles de parier sur le développement de telle ou telle innovation sociale, pratique ou artistique, et plus généralement créative au plan technique ou économique. Ce qui revient à parier sur le fait que toute richesse naît d'abord des hommes, de leurs échanges et de leur libre créativité, qu'elle est donc sociale et éminemment urbaine, avant d'être économique et financière.
D'où notre question : les “cultures urbaines” font-elles la ville ?
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